Responsabilité d'entreprise et éthique sont-elles solubles dans la mondialisation ?

Responsabilité d'entreprise et éthique sont-elles solubles dans la mondialisation ?
Aux Editions de l'Aube

19 octobre 2011

L'étiquetage environnemental, une belle diversion

La diversion consiste à attirer l’attention et faire dériver les actions vers un sujet moins prioritaire que d’autres, voire accessoire. Il y a deux manières de faire diversion. De façon inconsciente, naïve et par incompétence : c’est sans doute le cas de certains gentils petits militants environnementalistes. Mais surtout, par cynisme et intérêt privé : ceux qui sont au sommet de la pyramide (grands industriels, banquiers, politiciens, hauts bureaucrates) veulent conserver et accroître leurs privilèges.


L’étiquetage environnemental est un petit exemple de diversion. Comment peut-on s’intéresser au nombre de grammes de CO2 émis par la fabrication d’un pot de yaourt ? Non seulement cette information n’a aucune signification ni pertinence, tant les méthodologies et les périmètres de calculs (transports, sous-traitants, matières premières, emballages, mix énergétiques,…) sont empreints d’approximations, d’erreurs et de choix arbitraires. Mais surtout, qu’attend-on du consommateur s’il prend le temps de lire cette information ? Qu’il change la politique énergétique de son pays (ou son absence…) ? Qu’il pousse à lui tout seul à plus de nucléaire ? Qu’il achète un autre yaourt plus cher mais qui émet de 2 grammes de moins ? Qu’il se prive de yaourt ? De qui se moque-t-on ?

Pendant ce temps-là, d’éminents médecins se font massacrer par d’iniques procès lorsqu’ils demandent aux industriels d’indiquer la quantité de sel qu’ils ont introduite dans leurs plats cuisinés. Pareil pour le sucre et les produits gras, où même une loupe de 3 cm d’épaisseur ne vous donnera pas l’information. Sans parler de l’aspartam, des PCB dans les beefsteaks, du bisphénol A dans les canettes de boisson, des pesticides dans les fruits ou des OGM dans les légumes. Nous ingurgitons, sans le savoir, des quantités phénoménales de poisons qui font exploser le nombre de cancers, de maladies cardio-vasculaires, les cas d’obésité et autres catastrophes sanitaires.

Cacher ce que les produits contiennent pour détourner l’attention vers le type d’énergie produite pour les fabriquer est criminel.
Faire de la politique, organiser la cité, vivre, c’est faire des choix de priorités.
En cette période d’impasse budgétaire où nous a plongés la folie de l’hyper-capitalisme financier, perdre du temps et de l’argent public sur des faux sujets est une marque de plus de l’irresponsabilité de ceux qui prétendent nous gouverner.

4 commentaires:

Thomas Albisser a dit…

Bonjour,

Je suis tombé "par hasard" sur votre article, et j'avoue que j'ai du mal à vous suivre.
Si j'ai bien compris, vous pensez que l'étiquetage environnemental a été mis en place pour détourner l'attention de ce que contient véritablement le produit, tout en poussant à justifier le nucléaire, peu émetteur de CO2 ?

Si c'est cela, je ne suis pas d'accord sur plusieurs points :
Premièrement, l'empreinte environnementale prend en compte, bien souvent, le mix énergétique du pays où est produit le yaourt. Celà peut être la france, mais nous savons justement que c'est de moins en moins le cas. Viens alors un autre point important : l'empreinte CO2 permet aussi de mettre en avant le trajet du produit jusqu'à nos assiettes. Et ça c'est un plus.

Ensuite, votre raisonnement met l'environnement en dessous de la santé. Il s'agirait donc d'un problème de priorité : d'abord on s'occupe d'afficher le contenu du produit, ensuite nous nous occupons d'afficher l'impact environnemental. C'est un choix personnel propre à chacun. Pour ma part, l'environnement étant lié à ma santé, je les mets quasiment à égalité.

Enfin, qu'attend-on du consommateur ? Pour ma part, il s'agit de prendre en compte ce critère, certainement après le prix certes, mais le prendre en compte. Et si cela permet au fabricant du pot de yaourt de voir qu'il faut investir sur ce critère pour gagner des parts de marché, alors, l'affichage environnemental aura été un succès. Je ne parle par de 100 % des consommateurs, mais commençons par quelques pourcents ...

Là où je vous rejoins c'est qu'il y a énormément de progrès à faire sur les méthodologies, les calculs etc.

Au plaisir d'en débattre d'avantage,
Amicalement

Philippe Laget a dit…

de Auteur à Thomas : merci pour votre commentaire. Oui, c'est une question de priorités. 100 % des consommateurs préfèrent prioriser l'impact sur leur santé des contenus des produits que les impacts, lointains, flous et perçus comme aléatoires, de leur fabrication sur le climat des pays du Sud. Mettre des substances nocives dans les produits sans afficher leurs compositions est criminel.Interdire les crimes d'aujourd'hui est une priorité.
Je n'ai pas besoin de calculs CO2 pour lire l'étiquette made in China sur mes produits ou pour savoir que mes fraises, venues du Maroc, sont 40 % moins chères que celles de Bretagne. L'étiquette CO2 n'aura aucun impact sur les comportements des consommateurs, c'est une opération d'enfumage. Tout ça va nous conduire à faire sauter la contrainte carbone, voir mon dernier billet.
Au plaisir de continuer à échanger. Ph. L

Thomas Albisser a dit…

Je vous rejoindrais en disant que pour moi ce n'est pas l'un ou l'autre, mais bien l'un et l'autre, il n'y a pas d'exclusivité entre ces deux informations!
Quant à l'impact sur le consommateur, je pense que personne aujourd'hui ne peut le prédire. Attendons et voyons :-) !

Philippe Laget a dit…

Non, Thomas, faire de la politique c'est faire des choix, pour maximiser le bien commun. On ne peut jamais tout faire en même temps, surtout avec l'austérité budgétaire actuelle. Face à l'urgence sanitaire (explosion du nombre de cancers), on n'a pas le temps d'"attendre et de voir".