Responsabilité d'entreprise et éthique sont-elles solubles dans la mondialisation ?

Responsabilité d'entreprise et éthique sont-elles solubles dans la mondialisation ?
Aux Editions de l'Aube

20 décembre 2009

Les leçons de Copenhague

Alors que les Chefs d’Etat représentent (la plupart du temps démocratiquement) leurs citoyens et que tous les citoyens du monde (ou presque) ne veulent pas d’un chaos climatique qui affecterait leurs conditions de vie ou celle de leurs enfants, ils ont échoué à trouver un accord. Pourquoi ? Parce que, sous l’effet de la mondialisation voulue par les décideurs, tous les pays du monde sont en guerre. En guerre économique, les uns contre les autres.
Les Chefs d’Etat sont-ils sous influence des grands lobbies industriels, notamment ceux liés au secteur énergétique, qu’ils soient producteurs ou gros utilisateurs ? Du moins de ceux, parmi eux, qui s’imagineraient que transformer leur outil de production, adapter leurs business models, remplacer la quantité par la qualité, trouver de nouveaux marchés à l’étranger… affecterait la rentabilité servie à leurs actionnaires. Les beaux discours sur l’innovation créatrice de valeur ne seraient-ils pas sincères ? Et que valent-ils devant la facilité des délocalisations ?
Mais qui peut croire que les intérêts des grandes entreprises sont nationaux ? Les multinationales n’ont pas de patrie, comme le capitalisme. Qui peut encore prétendre que Total est une entreprise française et Arcelor-Mittal une indienne ? Non, fausse piste, les raisons de l’échec sont à chercher ailleurs. Les Chefs d’Etat ne savent tout simplement pas comment découpler la croissance économique de leur pays et la préservation de l’environnement (qu’il soit local ou global), sur la durée d’un mandat électoral. Ils ne veulent pas d’une contrainte supplémentaire qui accentuerait le chômage dans les pays industrialisés ou freinerait le développement de ceux du Sud. Car, les chômeurs d’un côté, et les pauvres de l’autre, sont aussi des électeurs, autant que des sources d’ennuis. Les problèmes d’aujourd’hui ont plus de poids que ceux de demain. En donnant la préférence au présent de leurs électeurs, les élus renoncent à faire des calculs d’actualisation du bien-être sur le long terme. Ici et maintenant, chacun pour soi.
La terre n’est pas plate, elle est morcelée en une multitude d’îlots d’intérêts et d’égoïsmes privés (bien plus que 192). Dans ces conditions, la théorie des jeux (je n’avance que si tu avances, et réciproquement), appliquée à la problématique du bien commun, nous apprend qu’il n’y a que deux scenarios : « tous ou personne ». On s’en sort tous ensemble ou bien tout le monde coule sur le Titanic, les riches comme les pauvres.
Qui pouvait être assez naïf pour croire que l’usine à gaz onusienne, qui permet à chacun des 192 pays - quelle que soit son influence sur le monde - de mettre indéfiniment son grain de sel et le transformer en grain de sable, pouvait faire converger des intérêts privés vers l’intérêt général ? Si l’on savait gouverner le monde en l’absence de gouvernement mondial, cela se saurait et le problème de la faim dans le Sud - qui bizarrement fait couler beaucoup moins d’encre que celui du climat… - serait résolu depuis bien longtemps.
Toute l’Histoire, depuis les gallo-romains jusqu’au plan Marshall (et, espérons-le un jour, le conflit israélo-palestinien) , nous apprend qu’il n’y a qu’une seule issue pour la paix : comme les vainqueurs avec les vaincus, les forts doivent aider les faibles. En matière de climat, comme en matière de développement, le Nord doit aider le Sud.
Les gens ne veulent pas de la guerre économique, d’une mondialisation qui écrase les salaires et précarise les emplois des occidentaux même si, dans le même temps, elle sort de la pauvreté trois cent millions de chinois. Mais les chinois eux-mêmes veulent-ils d’un développement qui rend leur air irrespirable, leur eau polluée et leurs campagnes désertifiées ? Personne ne leur demande leur avis.
La vie serait douce si l’on ne nous forçait pas à lutter les uns contre les autres. Demain, nous demandera-t-on de construire des murs anti-réfugiés climatiques ?
Copenhague nous interroge : toujours chercher à qui profite le crime ?

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